Rêve d'Égypte

Rodin l'Égyptien

Mais pourquoi Rodin s'était-il pris de passion pour l'Égypte ? À l'époque, c'est vrai, Paris est la capitale de l'"égyptomanie". Depuis la campagne de Napoléon Ier, les Français s'intéressent à l'Égypte : on y fait des fouilles archéologiques, et Champollion perce le secret des hiéroglyphes en 1822, une avancée majeure. Rodin a tout juste 10 ans, en 1850, quand Auguste Mariette exhume à Saqqarah la célèbre statue du Scribe accroupi (musée du Louvre). Les musées se dotent de collections égyptiennes : le Louvre bien sûr, mais aussi le musée Guimet. Dans les expos universelles, on peut voir des palais égyptiens.
Passionné d'art ancien, Rodin s'intéresse logiquement à l'Égypte, et il ne sera pas le seul : Brancusi, Matisse et Picasso feront de même. À partir de 1890, il se met à collectionner des oeuvres sculptées, qu'il rassemble dans sa villa de Meudon, puis à l'Hôtel Biron. Il se fournit auprès d'antiquaires parisiens ou de marchands installés au Caire, et parvient à rassembler plus 1000 oeuvres, de l'époque pré-pharaonique à l'époque arabe.

Mais, pour Rodin, ce n'est pas juste une mode : il y voit un moyen de nourrir ses propres recherches sur la représentation du corps, la simplification des formes, le fragment ou la monumentalité. Il ne souhaite pas copier les oeuvres ou les motifs, mais tirer des leçons de l'art égyptien, qu'il pourra réinvestir dans sa propre création. Il se veut "égyptien" dans sa quête d'artiste. Ce qu'il aime dans cet art, c'est la simplification des lignes et des formes, le traitement de la monumentalité. Cela aura un fort impact sur son oeuvre, qui est habitée par cette passion. Et puis, il a déjà en tête de créer son futur musée, à l'hôtel Biron, pour la postérité et l'éducation des jeunes artistes.

L'expo présente 400 objets restaurés pour l'occasion, mêlant collection égyptienne et oeuvres de Rodin. Vous verrez aussi des photographies et des archives, qui éclairent ses liens avec les antiquaires, les marchands d'art.
L'idée est de montrer la résonance de l'art égyptien dans l'oeuvre de Rodin. Et c'est vraiment intéressant de passer sans cesse de l'un à l'autre ! Cela dit, on vous conseille fortement de suivre le parcours enfants (voir ci-dessous), car l'expo est assez pointue et difficile d'accès pour eux sans cela.

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Parcours enfants

Dans l'expo, un parcours invite les enfants à se mettre dans la peau d'un archéologue, pour percer les mystères qui entourent ces objets et comprendre les sources d'inspiration de Rodin. Concrètement, vous trouverez des cartels enfants sous certaines oeuvres, reconnaissables à leur petit dessin de la déesse Bastet (une chatte). Ils proposent des jeux d'observation et donnent des clefs pour comprendre les oeuvres. Très sympa à faire, car le parcours est déjà organisé (ce qui ne vous empêche pas non plus de laisser papillonner les enfants dans les salles !). C'est un peu comme un chasse au trésor, il faut chercher les oeuvres, ce qui plaît toujours aux enfants.

On voit par exemple des assemblages de Rodin, qui est un peu le roi du recyclage ! Il a en effet tenté d'assembler des vases antiques avec ses propres sculptures. Étonnant ! Vous verrez de très belles statues égyptiennes, dont il faudra observer la position du corps. Les enfants adoreront aussi rencontrer le scribe Nana ! Son très beau sarcophage, avec son nom inscrit dessus, invite à réfléchir aux rituels funéraires. Un peu plus loin, une table d'offrandes magiques, car même dans l'au-delà, il faut pouvoir manger. On sculptait sur ces tables des aliments (un pain ici) et ils étaient transmis comme par magie dan le monde des morts. Les enfants pourront d'ailleurs, tout au long de l'expo, réviser la généalogie des dieux égyptiens : Hathor, Bastet, Anubis, Thot, Isis... Ils sont tous là !

Ne ratez pas la petite salle "Dans l'atelier d'un artiste égyptien" : en s'appuyant sur l'archéologie expérimentale, elle explique le fonctionnement d'un atelier égyptien, où chaque artiste a une fonction définie. Pour réaliser un scène sculptée par exemple, un scribe des contours fait le dessin préparatoire, un sculpteur graveur donne du relief à la pierre, puis un scribe peintre appose les couleurs. Un travail d'équipe ! C'est aussi l'occasion de mettre enfin un nom sur cette façon qu'ont les Égyptiens de représenter les humains en associant plusieurs points de vue (tête et jambes de profil, torse de face) : cela s'appelle l'aspective ! Avec ça, les enfants sont sûrs d'épater la maîtresse/le maître ! ;)
Dans cette salle, il y a un banc où on peut faire une pause et s'installer pour dessiner.

Enfin, on a beaucoup aimé les têtes sculptées égyptiennes, exposées aux côtés d'une tête monumentale de Balzac et d'un buste de la Duchesse de Choiseul, oeuvres de Rodin. Et lorsque vous vous retournez, vous tombez sur Balzac lui-même, tout entier (Balzac monumental en plâtre). Le Monument à Balzac est l'une des oeuvres les plus connues de Rodin, elle a fait scandale en son temps, et surtout elle a quelque chose d'égyptien ! Cette statue massive fut comparée aux colosses égyptiens et certains avaient remarqué que vue de derrière, elle avait la forme exacte d'un sarcophage ! Rodin disait lui-même que son Balzac était "le Sphinx de la France".

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Visite guidée en famille

Le musée propose une visite en famille "Rêve d'Égypte", qu'on a testée (à partir de 6 ans). Elle permet de faire le tour de l'expo dans la bonne humeur.
Munis d'un petit livret-jeux, les enfants recherchent des oeuvres dans les salles, les observent, les comparent et essayent de comprendre leur sens ainsi que leur importance pour Rodin. On s'amuse aussi : les enfants dessinent, jouent aux mimes, et surtout ils peuvent poser toutes les questions qui leur passent la tête ! On a trouvé l'ambiance de la visite détendue et très bienveillante. C'est une belle plongée dans la culture égyptienne et l'univers de Rodin !

Du mardi au vendredi pendant les vacances de Noël et de février (zone C.) Horaires : de 15h à 16h.